MA scène nationale – Pays de Montbéliard s’ouvre à la formation professionnelle

Face aux enjeux de la transition numérique dans le spectacle vivant, MA scène nationale – Pays de Montbéliard ouvre un onglet “formation professionnelle” dans sa programmation. Depuis quatre années, les nouvelles manières de faire et d’écoutes sont en effet au centre des réflexions de la direction de Yannick Marzin. Lauréat de l’appel à projets France 2030 pour le son immersif dans le spectacle vivant, le programme “SONORAMA” est ainsi lancé en 2021. Il s’appuie, depuis l’achèvement l’année dernière, sur ses studios Ars Numerica, nouveau pôle international de création et de production radiophoniques et sonores.(1) Fort de son investissement dans la création sonore et des nouvelles technologies qui la nourrissent, Fabrice Boy, qui assure la direction adjointe de MA scène nationale – Pays de Montbéliard, nous partage les choix de cette orientation et déclare les inscriptions ouvertes.

Pouvez-vous nous dire comment la dynamique de “formation professionnelle” a-t-elle fait son apparition dans la programmation de votre saison ?
Fabrice Boy : Cette dynamique s’inscrit dans le cadre du projet mené à MA scène nationale – Pays de Montbéliard que nous avons défini dans les CPO (Conventions pluriannuelles d’objectifs). Celles-ci nous permettent de définir un projet structuré sur quatre années. C’est ainsi que nous soutenons depuis plusieurs années une réflexion et des propositions autour du média radiophonique et de la création sonore. La structure a développé RadioMA mais a aussi réalisé, avec des artistes et réalisateurs sonores, des podcasts ancrés dans le territoire. Nous avons donc fabriqué le contexte qui rendait propice à proposition de formation. À cela, la particularité de MA scène nationale est qu’elle vise le territoire du Pays de Montbéliard qui représente soixante-treize communes, soit plus de 110 000 habitant.e.s. Si Montbéliard concentre près de 25 000 habitant.e.s, les deux-tiers des communes touchent à l’ultra-ruralité. Nous connaissons la complexité de toucher cet ensemble de personnes, et notamment dans un contexte financier complexe et tendu ; le média radio se révèle être un excellent moyen d’irriguer nos actions à l’ensemble de ce territoire.

Vous développez, depuis 2021, le projet “SONORAMA” qui regroupe l’ensemble des activités de MA consacrées à la composition sonore et aux nouvelles écritures. Quels sont les enjeux de celui-ci ?
F. B. : La nouvelle orientation du projet MA scène nationale – Pays de Montbéliard suite aux CPO concernait la dimension radio. Nous avons ajouté à celles-ci, depuis deux années, une réflexion qui menait à l’interpénétration ou à la porosité entre le média sonore, la création sonore et le spectacle vivant. De quelle manière l’écriture sonore, les technologies sonores et leurs outils vont-ils maintenant nourrir des nouvelles formes d’écriture dans le domaine du spectacle vivant ? “SONORAMA” est d’une certaine manière une réponse à cet enjeu ; c’est le terme au sein de notre structure qui permet d’écrire la réflexion touchant au son spatialisé, à ses outils technologiques et son incidence quant aux processus de création dans le domaine du spectacle vivant. Nous avons développé, parallèlement à ces activités au sein des locaux de MA Scène Nationale – Pays de Montbéliard, une dimension hors les murs. Dans le cadre des appels à projets France 2030, nous avons construit un projet de station d’écoute binaurale nomade avec nos partenaires Making Waves de Noisy-le-Sec, Longueur d’ondes de Brest et Feichter Audio qui s’est occupé de toute la partie développement technologique. Dotée d’une qualité sonore exceptionnelle, elle accueille entre huit et trente-deux auditeur.rice.s et irrigue tout le territoire des créations que nous produisons. Grâce à un principe très simple de plug and play, dans une scénographie modulable, elle s’installe à la fois dehors et dedans, autant au sein d’un plateau de théâtre, que dans une chambre d’hôpital, dans une médiathèque. Il nous restait ainsi à développer, en plus de l’outillage technologique que demandent toutes ces qualités d’écoute – ambisonique, binaural natif, binaural –, l’acculturation des metteur.se.s en scène, chorégraphes d’un territoire par le biais de la formation et faire le lien avec ces créateur.rice.s qui s’emparent de ces nouveaux outils.

Quelles sont les attentes de cette formation ?
F. B. : Avec une formation de courte durée, nous visons l’acculturation des outils, c’est-à-dire la compréhension des enjeux de l’écriture audio 3D et la distinction entre les différentes possibilités technologiques dans le domaine de l’immersion sonore afin d’identifier les possibilités artistiques que celles-ci amènent. Nous offrons deux sessions de deux journées. La première les 18 et 19 novembre 2025 et une deuxième session les 10 11 février 2026. Elles sont ouvertes à la fois aux créateur.rice.s, artistes, mais aussi aux directions de théâtre, salles de concert, et leurs directions techniques et technicien.ne.s. Nous sommes évidemment confrontés à la problématique globale de notre écosystème qui voit d’un côté les artistes prendre la dynamique du son spatialisé et l’intégrer à l’un de leurs projets, mais si les salles de diffusion ne sont pas équipées, le spectacle ne tournera tout simplement pas. Nous menons ainsi une réflexion globale avec tous les différents opérateurs du spectacle vivant et l’idée de la formation vient de là. Si l’ensemble des parties prenantes d’un territoire vient à être concernée, alors nous arriverons à l’avenir – et nous l’espérons – à proposer des formations plus spécialisées que toutes ces qualités d’écoute demandent.

Si MA scène nationale – Pays de Montbéliard est particulièrement engagée dans la transition numérique du spectacle vivant, comment atteindre ses objectifs à l’échelle nationale ?
F. B. : Nous sommes actuellement dans une logique de la patience et dans un travail de prosélytisme avec nos partenaires, qu’ils soient régionaux (Scènes labellisées, SMAC, CDN) ou nationaux comme les Scènes nationales. Nous réfléchirons ensuite à avoir, à l’échelle globale, au sein d’une communauté d’intérêts, un investissement commun et à savoir comment le porter, qui le porte, comment est-il financé. Nous sommes bien conscients que le contexte actuel complexifie les prises de décisions sur ce type de projet. Ce que nous ne souhaitons pas faire, c’est faire le choix d’investissements en étant seul, ce qui n’aurait aucun sens. Nous pensons à une manière complémentaire, mutualisée en coopérative, forte d’un ensemble d’opérateurs qui puisse être un réseau de diffusion pertinent à l’heure où les œuvres seront réalisées. Nous avons développé notre station binaurale nomade au casque et une production d’œuvres pouvant être diffusées. La station nomade sort de la phase de prototypage, elle fonctionne auprès des publics. Sa version définitive sortira au mois de janvier et partira au festival Longueur d’ondes à Brest puis sera à Chaillot Théâtre National de la Danse au mois de février 2026. Nous espérons que d’autres Scènes nationales s’intéresseront à cet outil et à la production d’œuvres sonores qui entre-mêlent spectacle vivant et création sonore.

Ouvertes à tou.te.s les professionnel.le.s du secteur culturel et animées par Pascal Rueff, retrouvez toutes les modalités d’inscription aux deux sessions (mardi 18 et mercredi 19 novembre 2025 & mardi 10 et mercredi 11 février 2026) ici
(1). www.revue-as.fr/2024/05/03/ma-scene-nationale-developpe-limmersif-avec-ars-numerica