De la raison et des envies
La vocation, c’est avoir pour métier sa passion
Frédéric de Stendhal
Les premiers pas
Jean-Jacques Vias a obtenu un Bac Économique et Social en 1985. Puis il enchaîne avec une École de commerce. En même temps, il avait une passion, celle de la musique : il était guitariste classique. Toujours attiré par le son et plutôt éclectique, une annonce se présenta à lui.
Jean-Jacques Vias : “Je lis une information disant que Yamaha recrute pour le Sud. En bon parisien j’ai cru que c’était le Sud de Paris, mais c’était en fait le Sud de la France ! C’était en 1993 ou 1994. Avantage de la jeunesse, pourquoi pas ? J’ai donc commencé à m’occuper de tout le Sud de la France pour Yamaha dans la division audio pro.”
L’histoire a alors commencé comme cela : c’était l’époque des PM 3000 et 4000 et du développement des premières consoles numériques qui se démocratisaient avec la ProMix notamment.
Au bout de trois, quatre ans, Jean-Jacques a été débauché par Harman, toujours pour le Sud de la France. Ensuite Harman est devenu Audiopole, mais le courant passait moins bien ; donc, notre ami est parti faire un très court passage chez ASV (Atelier Sud Vidéo) à Montpellier.
Un jour, J.-J. Vias travaillait sur la réfection audio de l’amphithéâtre d’IBM et l’idée lui est rapidement venue que le matériel Nexo conviendrait parfaitement. Il a donc contacté Denis Baudier, responsable des ventes chez Nexo à l’époque.
Jean-Jacques Vias : “Il m’a dit OK pour le matériel mais également qu’il avait un poste à me proposer car l’activité devenait débordante sur la France. Il m’a donc engagé comme ingénieur commercial chez Nexo pour le Sud de la France ! C’était il y a un peu plus de quinze ans. Plus tard, Denis Baudier est passé à l’export et j’ai récupéré la France entière. On m’a ensuite également confié le Maroc, l’Algérie, la Tunisie. Puis Paul Massiani, venant de L-Acoustics, nous a rejoints pour renforcer l’équipe.”
Nexo pur jus
Dans ce parcours, J.-J. Vias perçoit que Nexo est vraiment une petite structure, même si elle a été rachetée par Yamaha. C’est une méritocratie : “Plus tu apportes des choses, plus tu avances et plus tu es récompensé. Dans cette petite structure, tu disposes de beaucoup d’autonomie. On laisse beaucoup de place à l’initiative”. Il est aujourd’hui le responsable des ventes France et une partie de l’Afrique francophone, ce qui comprend, au-delà du CA, un véritable travail de développement de l’image de Nexo. En France, Nexo réalise en moyenne 4 M€ par an, en allant du petit théâtre aux parcs d’attractions, en passant par les stades et les salles de sports.
Jean-Jacques Vias : “La composition du marché des enceintes ne laisse que peu de place au haut de gamme, 60 % de celui-ci étant représenté par le ‘MI’ caractérisé principalement par toutes les références d’enceintes ‘plastiques’ amplifiées ou non dédiées aux petites formations et musiciens.
Il reste donc 40 % à se partager avec quelques constructeurs qui y apportent leurs solutions et leur empreinte. La force du marketing consistera à faire ou défaire les phénomènes de mode et habitudes ancrés dans ce marché élitiste. Sur le plan international, la France a le privilège de beaucoup exporter, c’est un territoire de fabricants.”
Nexo réalise 85 % de son CA à l’export. Les usines sont basées près de Roissy-CdG, avec également une filiale en Dordogne. Cette production en France est un élément de fierté et de valeur ajoutée pour la société.
Grâce à la progression du CA, la direction a pu progressivement mécaniser les tâches les plus ingrates et obtenir un niveau de productivité permettant de conserver les usines en France, tout en bénéficiant des avantages liés à la proximité entre les usines et le bureau d’étude.
Un marketing qualitatif
Le son est quelque chose de physiologique qui relève du domaine du plaisir, dixit Jean-Jacques Vias. C’est un moyen, un véhicule de plaisir pour transmettre des émotions, que ce soit dans une salle de sport, à un opéra, dans un festival. Le son, s’il est de qualité, au bout d’un moment, il s’oublie pour laisser entièrement place au spectacle. Il apporte un plus, cette petite touche qui fait que… Le son peut répondre à une palette très variée d’attentes : une dimension “plaisir” ou une dimension sécurité dans un stade, par exemple.
Un peu d’histoire de Nexo
Au début, en 1979, il y a Éric Vincenot, le créateur infatigable et concepteur de la marque. Ensuite est arrivé son associé anglais, Mike Johnson, qui a apporté une autre dimension à Nexo. Éric s’occupait avant tout du R&D et Mike de la finance. Cela a permis de construire l’entreprise car Éric réfléchissait et réagissait très vite en essayant toujours d‘avoir un coup d’avance. Il a beaucoup apporté au métier et a fait évoluer Nexo jusqu’au rachat par Yamaha. La société, c’est aussi une dépose régulière de brevets qui traduit bien la tradition d’innovation de la marque.
Les principales évolutions depuis 2000 dans le marché en France
Jean-Jacques Vias : “Je pense qu’il y a de plus en plus d’acteurs, qu’il y a eu un développement conséquent mais anarchique de petites sociétés de prestation et d’installation. Les sociétés importantes ont aussi progressé ; donc cela signifie que le marché global s’est développé. Signe de l’importance du spectacle en France. […]
Techniquement parlant, il y a de moins en moins d’autodidactes, d’apprentis sorciers du son et heureusement plus de techniciens qui se basent sur les règles de l’acoustique pour réaliser leur design sonore. Chez Nexo, nous pratiquons des ETC (Education, Training and Certification) qui permettent justement d’avoir des gens qui savent exactement ce qu’ils font, quels que soient les systèmes, quelles que soient les méthodes. Un des derniers ETC s’est déroulé au Maroc avec de nombreux prestataires qui s’équipent de nos systèmes d’occasion, puis en neuf. On apporte une véritable formation qui ne se contente pas de présenter nos systèmes mais apporte surtout une grande base théorique. […]
Le métier s’est professionnalisé, s’est spécialisé d’un point de vue des outils c’est-à-dire que ceux-ci sont devenus de plus en plus performants et précis. Il s’est produit l’arrivée de la ligne source, qui a beaucoup apporté. À partir de là, il y a eu le développement des systèmes, de l’électronique pilotant ces systèmes, qui sont toujours de plus en plus petits, de plus en plus puissants et qualitatifs. Je pense que nous arrivons à une période où la sono a rejoint la Hi-Fi. Avant, le fait de sonoriser un orchestre symphonique était mal vu et maintenant il y a de plus en plus de démonstration en direct où on oublie la sonorisation pour ne laisser part qu’à l’émotion.”
Les projets de Nexo
Jean-Jacques Vias : “Les projets de Nexo c’est de développer des gammes et de toujours faire en sorte d’afficher un excellent rapport qualité/prix/pression pour représenter un outil. Il ne faut pas se leurrer, nous sommes là pour développer des outils qui sont au service de l’art et de ses intervenants. Notre credo c’est d’être à l’écoute des utilisateurs de ces outils. […]
Au niveau du développement, il y a eu une grosse évolution électronique ces dernières années. L’électronique a pris de plus en plus de place. On n’est plus à l’époque où une enceinte représentait seulement un instrument. Ce stade-là est aujourd’hui largement dépassé. Maintenant, si je prends l’exemple de Nexo, on interprète 180 réactions linéaires ou non d’un haut-parleur… On sait exactement, dans une enceinte, ce qui se passe à telle fréquence, à telle pression, à telle température. Ce qui permet de configurer un système complètement transparent.”
Le réseau Nexo
Jean-Jacques Vias : “Nous avons un réseau de distribution qui est très stable. Notre politique est basée sur le fait de ‘qui sème, récolte’. Nous essayons d’avoir le meilleur de chaque région et nous aidons nos distributeurs. Leur rôle est avant tout de savoir conseiller les clients et de mettre en avant des solutions, ce qui suppose d’investir beaucoup de temps et d’énergie. Un distributeur Nexo doit avoir les produits dans son parc, en démo, du stock, doit aussi savoir consentir des conditions commerciales car le marché français est dynamique et très bataillé… Enfin, leur marge doit normalement refléter leur valeur ajoutée.”
Les évolutions du marché
Jean-Jacques Vias : “Nous pouvons avoir des évolutions assez fortes liées à des sorties de produits. Il y a plusieurs éléments qui déterminent cela : le marché par lui-même (développement ou non) et la pertinence des gammes d’une société par rapport à la concurrence. […]
Quand nous parlons de mutation de marché, de plus en plus de sociétés du son se mettent à faire de la vidéo live pour spectacle vivant. Le fait de regrouper le tout est rassurant et confortable pour un client. Il y a une mouvance de ce marché qui consiste à dire : une structure qui regroupe pas mal de solutions tout en étant spécialisée a plus de chance de remporter les marchés. C’est également la raison pour laquelle tous les constructeurs essayent d’avoir les gammes les plus larges possibles avec les solutions les plus pertinentes. […]
Le matériel évolue en permanence y compris par les upgrades de softs que nous mettons en ligne. Le passage de l’analogique au numérique a apporté beaucoup de nouvelles fonctionnalités dont l’upgrade des systèmes via les softs de gestion (loads). Le numérique a finalement permis d’obtenir beaucoup plus avec une dynamique phénoménale et pour un budget moindre.
D’un autre côté, le rythme de renouvellement du matériel évolue. Pourquoi changer si on n’a pas mieux ? Chez Nexo, quand nous sortons un nouveau système, il faut que ce soit toujours plus puissant, encore mieux défini. C’est une saine compétition entre les constructeurs qui nous oblige, au-delà de notre passion partagée, à avancer.
Conclusion : valeur et envie
Jean-Jacques Vias : “Tous les matins quand je me lève, je me pose plusieurs questions : que vais-je pouvoir apporter comme valeur ajoutée à la société ? Quand tu es salarié je pense que cette approche est quelque chose d’important. Et qu’est ce que la société m’apporte ? Elle m’apporte beaucoup et notamment des leviers pour avoir une prise sur ce marché.
Ce métier est un métier de passion. Une anecdote : je conserve tous mes pass, tous mes badges que je mets dans un tiroir que j’explore de temps à autre. J’y retrouve des prestations de 1993, 1994 qui me rappellent de bons souvenirs.
Ce métier permet de travailler de manière agréable grâce aux valeurs humaines que l’on y trouve. Nous avons encore la chance dans ce métier de pouvoir faire des affaires avec des gens qui partagent la même passion et les mêmes valeurs, et qui aiment d’autant mieux leur vie !”